Sur le plan politique, Haïti demeure sans autorités élues et lutte pour éviter le vide institutionnel. Le Conseil Présidentiel de Transition, mis en place par l’Accord du 21 décembre 2022, a réitéré son engagement à rétablir un gouvernement démocratiquement élu malgré le chaos ambiant. Son président, l’économiste Fritz Jean, a assuré cette semaine que des élections générales seront organisées d’ici février 2026 pour transférer le pouvoir à des élus légitimes, conformément à la feuille de route de la transition. Dans cette optique, le gouvernement de transition a adopté récemment un budget rectificatif prévoyant un effort financier exceptionnel en matière de sécurité : 31 milliards de gourdes (environ 250 millions de dollars) seront alloués au renforcement de la PNH, 7 milliards à l’acquisition d’équipements stratégiques et 4,4 milliards à la modernisation des Forces armées d’Haïti. L’objectif affiché est de restaurer l’autorité de l’État, protéger les citoyens et reconstruire un minimum de confiance dans les institutions.
Parallèlement, les organes prévus par l’accord politique poursuivent leurs travaux. Le Haut Conseil de la Transition a initié des consultations nationales, y compris avec la diaspora, sur un projet de réforme constitutionnelle visant à doter le pays d’un cadre institutionnel plus stable. De son côté, le Conseil électoral provisoire (CEP) mène depuis plusieurs semaines des rencontres avec les partis politiques et la société civile afin de préparer l’organisation logistique des futurs scrutins. Malgré ces avancées sur le papier, de nombreux observateurs doutent de la faisabilité du calendrier électoral tant que l’insécurité reste hors de contrôle. Les conditions actuelles ne permettent ni campagne publique, ni enrôlement des électeurs dans de larges zones du pays. Le processus électoral risque ainsi d’être compromis si la sécurité n’est pas rétablie urgemment, prévient-on au sein même des instances onusiennes.
La classe politique haïtienne, très divisée, peine à s’unir face à la crise. Le Premier ministre de facto Ariel Henry, dont la légitimité est contestée par une partie de l’opinion, gouverne par décret en l’absence de Parlement fonctionnel. Des rumeurs persistantes font état de tentatives de putsch ou de formation d’un « gouvernement parallèle » par certains opposants. Ces manœuvres ont conduit la Communauté des Caraïbes (CARICOM) à condamner fermement toute action visant à déstabiliser davantage le pays ou à s’emparer illégitimement du pouvoir. Malgré tout, le dialogue politique interne demeure au point mort. Aucune date n’a encore été fixée pour la conférence nationale inclusive prévue par l’accord de transition, et l’incertitude institutionnelle continue de nourrir l’instabilité.